Bonjour ! Limites Numériques a désormais sa page dédiée sur Mastodon, Linkedin et Instagram. On y partagera plus en détails nos travaux, nos inspirations, des idées.
Ce mois-ci on change d’angle pour effleurer la question des matières organiques, voire du vivant dans la conception du numérique.
🌿 Organique & vivant
Fabriquer les appareils qui font le numérique nécessite des matières minérales et fossiles aux quantités limitées sur Terre et dont l’extraction et la fin de vie pose de sérieux problèmes environnementaux (et géopolitiques).
Une branche de la recherche s’intéresse à ce que serait un informatique sans cuivre, sans silicium. C’est le cas par exemple de la bio-fabrication qui cherche à remplacer un par un les éléments par des matières renouvelables, compostables ou biosourcées :
Des batteries compostables à base de produits comestibles (avec la recette) ou à base de mycélium de champignons (qui ont toujours des métaux).
Un substrat de circuits à base de cellulose.
Ce circuit imprimé breveté par Jiva Materials avec une base fabriquée à partir de fibres végétales qui se dissout une fois immergée dans l’eau chaude ce qui permet de récupérer les composants soudés.
Super, mais est-ce une solution à nos problèmes ? Et bien pas vraiment. Ou pas tout de suite. D’abord parce que ces travaux restent des prototypes de labo et qu’il sera difficile de remplacer les nombreuses matières et composants du numérique. Ensuite parce que l’industrialisation pourrait poser problème. Car même si les matières sont biosourcées ou accessibles en grande quantité, la consommation de masse produit des processus extractivistes délétères que l’on connait : la production de bio-carburant détruit aujourd’hui des forêts primaires, le bio-méthane se développe en synergie avec l’élevage intensif etc. Donc continuez de garder le plus longtemps possible vos appareils 😉.
Pour continuer voici une approche plus radicale : remplacer le numérique lui-même par le vivant dans certaines fonctions comme de capter et indiquer des informations. Le canari dans la mine est l’exemple le plus connu mais il en existe des milliers d’autres. On parle alors de bio-indicateurs ou bio-moniteurs pour décrire un organisme (ou une partie ou plusieurs) qui contient une information sur la qualité de l’environnement (par exemple un polluant) qu’il est possible de voir ou de mesurer.
Dans cet article des informaticien.ne.s qui devaient équiper de capteurs différents lieux (jardin, zoo…), ont plutôt réfléchi à comprendre le vivant déjà en place. Plutôt que de substituer les nombreux bio-indicateurs, ils et elles ont cherché comment les interventions techniques permettaient d’accompagner de nouvelles manières de voir le vivant.
Jusqu’en 1996 le réservoir d’eau potable de Montsouris à Paris utilisait un “truitomètre” pour évaluer la qualité de l’eau. Plus baroque (ou victorien pour être précis), au XIXe, un anglais avait conçu un “baromètre à sangsues” qui utilisaient la réaction de ces animaux à la pression pour activer une cloche qui indiquait des tempêtes à venir.
Le projet Ozone tattoo explore l’utilisation de feuilles de tabac comme indicateur d’une présence d’ozone trop forte.
Les lichens peuvent être utilisés comme bio-moniteurs de la pollution, offrant une alternative aux capteurs low-cost utilisés dans les projets de captation citoyenne. Le premier article scientifique sur ce type d’utilisation date de 1866. Plus récemment le projet APIS les utilise pour surveiller la qualité de l’air.
Actu du projet Limites Numériques
Suite de notre travail sur la paramétrisation écologique avec une troisième piste : Repenser le par défaut. Cette fois-ci nous partons du constat que les choix par défaut des paramètres dans nos applications sont toujours l’option la plus consommatrice. Ce qui pose d’autant plus problème que nous ne les changeons jamais ou que les paramètres sont difficiles d’accès. Nous délaissons donc ce choix à des entreprises dont les enjeux sont bien plus économiques qu’écologiques. Au delà de préconiser bien sûr des choix sobres par défaut voici quelques autres idées :
Montrer les paramètres les plus changés par les gens pour avoir moins peur de changer le choix fait par l’application.
Choisir son par défaut personnel, pour que l’état d’un paramètre revienne toujours à son état sobre au bout d’un certain moment. Par exemple : Je fais une photo de haute définition ? Le smartphone reviendra à une qualité basse juste après un verrouillage de l’écran.
Le 1er février nous aurons le plaisir de participer à la Journée de l’écoconception numérique organisée par les Designers Éthiques.
Nous parlons d’obsolescence dans le dernier numéro de la revue de l’AMUE intitulé “Urgence sur les sobriétés numériques” co-édité par des membre du GDS EcoInfo du CNRS.
Nous enquêtons sur la maintenance des différentes couches logicielles d’Android, de l’OS aux Apps. Si vous travaillez sur du code fortement lié à Android, à Lineage, dans un studio de développement d’apps mobiles, ou sur des drivers on aimerait bien en apprendre plus sur votre travail (envoyez nous un petit message à limites@services.cnrs.fr.
Sans limites 🙃
Le site de la cop28 est sorti, et avec lui un joli bouton “passer à la version bas carbone”. Mais vu qu’il n’est pas activé par défaut, vous avez déjà téléchargé tous les contenus et images avant d’avoir cliqué sur le bouton... Sans oublier le vocabulaire problématique puisque le mode le plus consommateur est appelé “Retourner à l’expérience complète”, sous-entendant que le mode sobre nous fait louper des choses, alors qu’il pourrait être présenté comme un gain (une expérience plus rapide par exemple). Cet article parle de tout ça.
Depuis l’arrêt de l’application Maison Connectée d’Orange les ampoules connectées (et autres objets domotiques de la marque) sont bonnes pour la poubelle.
En vrac
La NASA vient de mettre à jour le code de la sonde Voyager 2 lancée en 1977, pour résoudre un problème de résidus combustibles qui s’accumulaient.
Un mode “réparation” arrive sur les téléphones Android pour éviter qu’un réparateur fouille dans vos données.
Lesjours.fr reviennent sur les rejets de l’industrie électronique aux alentours de Grenoble. On y apprend que l’usine a avalé en consommation d’eau l’équivalent de 100 000 habitants en un an.
L’extraction du nickel dans la forêt Indonésienne a déforesté l’équivalent de la ville de New York.
Nous sommes passés voir l’exposition de l’artiste Raphaëlle Kerbrat au Centre Pompidou. Son travail s’intéresse à la représentation sensible de la matérialité du numérique, comme le projet Si (1-BIT COMPUTER), une décomposition à grande échelle d’une opération de 1 bit, avec des morceaux bruts de silicium, composant essentiel de nos appareils.
Anecdotes
Gauthier : “Mon ordinateur est si vieux […] que je ne peux plus voir les pdf intégrés. J'aurai une bonne raison de ne pas lire mon contrat d'assurance je suppose.”
Recherche partenaires ou consortium ITEA ou ANR ou HorizonEurope intéressé par le projet logiciel libre (moteur d'inférences sous licence GPLv3+, en cours de développement) RefPerSys en https://github.com/RefPerSys/RefPerSys/ (et site amateur en http://refpersys.org/ ...).
Si intéressé, contactez moi (Basile Starynkevitch, 8 rue de la Faïencerie, 92340 Bourg-la-Reine) par courrier postal, ou par courriel vers basile@starynkevitch.net ou whatsapp vers 06 8501 2359.