Bonne rentrée à toutes et tous ! Après cette pause estivale, quoi de mieux pour procrastiner que de lancer une partie de jeu vidéo ?
🎮 Jeux vidéo
Pratiqué par 7 français sur 10, le jeu vidéo tient une place particulière dans l’industrie numérique.
Des riches univers à gros budget lancé sur console, au simple sudoku sur mobile, en passant par des mondes virtuels générés sur de lointains serveurs, le jeu vidéo est multiforme. Ce qui en fait un secteur dont les impacts sont complexes à mesurer. Quelques chiffres trop englobants risquent alors de cacher la diversité des pratiques.
Les études restent timides mais les initiatives pour prendre la mesure des enjeux écologiques commencent à fleurir (L’écran d’après, Playing for the Planet…). En France, l’attribution d’aides publiques sera bientôt contrainte par un bilan carbone des studios de jeux via le calculateur Jyros. Ces derniers devront compter les ressources nécessaires à la conception de leurs jeux, mais aussi celles nécessaires à les faire fonctionner. Dans sa thèse sur le sujet, Joshua Aslan estime que 60 à 90% de l’empreinte des studios est liée à la phase d’usage des jeux.
Car lancer un logiciel de traitement de texte ou lancer un univers 3D réaliste en 4K de la taille d’une planète n’a bien sûr pas le même effet sur l’énergie consommée, et surtout sur le matériel capable de les supporter. La quête des gros studios à utiliser le photoréalisme comme argument de vente n’est pas synonyme de sobriété.
En ce qui concerne l’énergie :
Elle est principalement consommée par la carte graphique. Le calcul et le rendu des images alourdissent les impacts de la phase d’usage, en particulier dans les pays où l’électricité est très carbonée, nous dit Joshua Aslan. Presque 70% de l’impact d’une console aux États-Unis peut être lié à son alimentation (et 20% en France).
Certains jeux laissent le choix de la qualité ou de l’énergie. Dans les paramètres d’Ultros, une barre simule l’énergie consommée selon les choix de résolution. MoonWakers (en développement) va même plus loin en nous demandant de choisir une qualité plus faible pour avancer dans l’aventure et bénéficier de nouveaux pouvoirs.
Mais ce qui se joue dans cette course à la performance et à la simulation du réel, ce n’est pas qu’une histoire de consommation électrique. Encore faut-il que notre matériel puisse lancer le jeu. Éviter l’obsolescence de nos équipements, voici là, la quête principale.
Le Score eco gaming, prévu par le catalogue de jeu Gamesplanet, utilise les configurations système minimales requises des jeux pour en estimer leur empreinte. Leur hypothèse ? Plus les composants requis sont puissants, plus leur fabrication aura d’impact.
Le guide de Jyros ou encore le Climate Game Toolkit préconisent, entre autres, de concevoir des jeux qui fonctionnent sur des appareils moins gourmands en matériel ou des consoles anciennes.
Il ne s’agit pas là de simplement y répondre par plus d’efficacité dans les calculs. Mais plutôt par une direction artistique originale, non basée sur le photoréalisme, et suffisante quant à l’expérience du jeu. Une démarche qui a l’avantage d’en réduire la taille (et donc son stockage, etc). Quelques inspirations :
Zelda : Breath of the Wild, largement acclamé pour son esthétique, exploite les capacités limitées de la Switch et n’utilise que très peu de textures en haute résolution.
L’excellent Return of the Obra Dinn utilise un rendu monochromatique inspiré des premiers Macintosh, lui donnant une identité graphique singulière.
Du côté de la sphère indépendante, le retour de la “3D moche” va bien au delà d’une nostalgie des années 90. La remise en question de ce qui serait beau est une manière de mettre l’accent (et l’argent) sur ce qui fait l’essence d’un jeu : ses mécaniques et l’interaction. En mettant la qualité graphique au second plan, il devient plus facile pour les concepteur·rices de changer la direction d’un jeu que si des milliers d’heures avaient été engagées sur les graphismes.
Les débuts de l’histoire vidéo-ludique sont aussi source d’inspiration. Faire rentrer un jeu sur quelques kilo-octets ou nous immerger dans un univers par un écran de 50 couleurs d’une centaine de pixels de large était un véritable challenge. Les choix créatifs découlaient souvent des limitations techniques et technologiques de leur support :
La capacité de la cartouche de la Nintendo étant limitée, il n’était pas possible de stocker un nouveau sprite (élément graphique) pour un deuxième personnage dans Mario Bros. La console change donc tout simplement les couleurs de Mario. Luigi, son frère jumeau est né.
Le brouillard dans Silent Hill (1999) donne non seulement une ambiance propice au jeu d’horreur, mais permet aussi de ne pas afficher les objets trop éloignés et trop difficiles à calculer pour la console.
Les univers des premiers jeux s’inspiraient directement des contraintes des écrans en noir et blanc : l’espace dans Spacewar! en 1961, ou un taxi de nuit simulé par quelques pixels blancs sur fond noir pour Night Driver en 1976. Dans ce dernier les sons étaient créés dynamiquement en jouant sur la fréquence hertzienne, ce qui allégeait le jeu en évitant de stocker des enregistrements.
Pour finir, la question écologique peut passer par d’autres récits. Sur Terra Nil (sorte d’anti-SimCity) vous devez recréer le vivant et partir sans laisser de trace. Dans Backfirewall_ vous êtes un assistant de mise à jour devant sauver le précédent système d’exploitation de l’obsolescence programmée.
Actualités du projet Limites Numériques
On a ouvert une offre d’emploi (CDD de 5 mois) pour nous aider à penser de nouvelles interfaces et animer un travail de design fiction.
Le 25/09 Thomas sera à Numériques en Communs à Chambéry avec Cécile Diguet pour animer une balade urbaine des infrastructures du numérique et parler de leur empreinte.
Le 27/09 à Paris Web, on explorera les formes possibles d'un alter design numérique plus écologique.
Le 6/11, Thomas encore lui, interviendra au GreenTech Forum pour échanger sur les relations entre innovation et sobriété.
Sans limites 🙃
Une histoire de casques filaires, nécessitant une connexion Bluetooth pour fonctionner. Le câble ne servant pas à transférer l’audio mais plutôt à alimenter en énergie depuis le téléphone la puce Bluetooth du casque (plutôt qu’une batterie) pour pouvoir ENSUITE échanger les données audio avec le smartphone. Ça va vous suivez ?
L'appli pour lacer automatiquement ses chaussures Nike n'est plus sur l'App Store. En même temps vous l’avez un peu cherché.
Vrac
L'augmentation du trafic internet en France ralentit : +8% de 2022 à 2023 contre +21% de 2021 à 2022.
Cet article (en anglais) raconte l’histoire des bateaux qui déposent ou réparent les câbles de l’Internet au fond de l’océan. Et cette vidéo revient d’ailleurs sur l’aventure en 1850 du premier câble transatlantique et la difficulté d’en trouver un de 3000 km assez solide mais pas trop épais pour pouvoir être transporté et déposé à 4 km de profondeur.
Les stickers “Garantie annulée si retirée” présents dans divers objets électroniques pour nous empêcher de les ouvrir n’ont pas de valeur juridique aux États-Unis et ne font pas perdre la garantie légale en France.
Anecdotes
“Cet été en festival, après une averse orageuse, le réseau est un peu en berne, rendant hors-service les TPE de cartes bancaires. Les commerçants de la zone des foodtrucks se mettent alors en quête de connexion dans une chorégraphie insolite, parfois en fixant le terminal de paiement au bout d’un selfie-stick pour finaliser la transaction. Pas certain que ces gestes fonctionnent, mais ils avaient quelque chose de beau.” Thomas.
En jeu vidéo, à noter le studio Die Gute Fabrik qui l’année dernière a fait faire un rapport d’impact climatique du développement de leur dernier jeu (Saltsea Chronicles): https://gutefabrik.com/climate-report/
Chouette panorama.
Signé un gars qui, lorsqu'il avait 16 ans, avait créé (où plutôt tenté de créer) de micro-jeux sur un ZX81 (avec un 1ko de mémoire !)